Les dirigeants des entreprises publiques doivent être choisis sur la base d’un projet de bonne gouvernance (Analyse)
LIBREVILLE (Equateur) – L’efficacité et la rentabilité des établissements publics à caractère industriel et commercial tels que l’AGP, l’IGIS, l’ANGTI, Gabon 24, Gabon télévision, et bien d’autres, pourrait venir de l’exigence par le gouvernement, d’un projet de bonne gouvernance présenté et soutenu par toute personne qui souhaite diriger ces entreprises publiques.
Le ministre d’Etat à l’Enseignement supérieur, Jean de Dieu Moukagni-Iwangou, vient d’expérimenter cette méthode dans la désignation des dirigeants des universités et grandes écoles du Gabon. C’est sur la base de leurs projets de bonne gouvernance sur trois ans, présenté l’année dernière au Conseil d’administration de l’Enseignement supérieur, que les nouveaux responsables de ces établissements supérieurs, ont été choisis avant d’être nommés lors du dernier Conseil des ministres.
La recherche de la bonne gouvernance
L’objectif recherché par cette méthode, n’est rien d’autre que la bonne gouvernance de ces établissements supérieurs. Une bonne gouvernance qui passe inéluctablement par la présentation de la vision qu’on a pour l’établissement, les objectifs que l’on vise et les résultats qu’on s’engage à atteindre dans un délai relativement court (trois ans), afin d’amorcer le développement, la croissance et la rentabilité de ces universités et grandes écoles. Un procédé qui n’est pas nouveau, car il est pratiqué par les entreprises privées.
L’homme qu’il faut à la place qu’il faut
En effet, pour un poste à pourvoir, un appel à candidature avec des missions et des attentes clairement définies, est lancé en interne ou en externe, afin de permettre aux éventuels candidats intéressés par l’offre de postuler. Les directions de ressources humaines par le biais de leurs services de recrutement, ont alors la responsabilité de réceptionner les dossiers, qui contiennent notamment les diplômes, les curriculums vitae et autres attestations de travail.
Ces éléments indispensables permettent non seulement de connaitre le profil du candidat, mais surtout d’écarter les dossiers non conformes. Et les candidats dont les dossiers auront été retenus, seront évalués au cours des entretiens (entre deux et trois entretiens selon les entreprises), avant la décision finale.
C’est donc grâce à cette méthode rigoureuse de recrutement, que les entreprises privées choisissent leurs employés, notamment les cadres de direction. Et c’est aussi grâce à cette méthode que le profil de la personne choisie, correspond au poste à pourvoir, et que cette personne peut remplir convenablement la mission qui lui est confiée. Toutefois, lorsque cette méthodologie de recrutement est biaisée, il est évident que la personne choisie ne produira aucun résultat probant, si ce n’est l’échec et la déception.
C’est certainement au regard des résultats obtenus dans les entreprises privées grâce à cette pratique (dynamisme, croissance, rentabilité, bonne gouvernance …), que Jean de Dieu Moukagni-Iwangou a décidé de l’appliquer dans la désignation des dirigeants des universités et grandes écoles publiques du Gabon. Et nous disons que cet exemple doit être appliqué par le gouvernement pour la désignation des responsables des entreprises publiques à caractère industriel et commercial (EPIC) telles que l’Agence gabonaise de presse-AGP, la Société gabonaise de transport-SOGATRA, Gabon télévision, Gabon 24 pour ne citer que celles-là. Pourquoi ?
L’égalité des chances
Premièrement, parce que cette méthode donne la possibilité à tous les gabonais nantis d’une compétence ou d’une expérience avérée dans la gestion des entreprises ou des administrations, de proposer au gouvernement ce dont il est capable d’apporter au sein de l’entreprise qu’il souhaite diriger. Un procédé qui est conforme à la volonté du président de la République, Ali Bongo Ondimba, dans sa politique d’égalité des chances. Ce qui suppose un appel public à candidature, ouvert à tous les gabonais.
Le candidat qui correspondra au profil recherché par le gouvernement, (quelle que soit sa condition sociale) et qui proposera un projet plus pertinent pour la croissance et la rentabilité de l’entreprise, sera retenu pour une durée minimale de trois ans. A la fin de ce délai, si les objectifs et les résultats attendus n’ont pas été atteints par ce dernier, il sera simplement remercié. Mais si les objectifs et les résultats prévus ont été atteints ou dépassés, il pourra alors continuer à gérer l’entreprise.
Des entreprises à fort potentiel
Les EPIC sont des véritablement niches d’argent. C’est pourquoi elles ne doivent pas être confiées à n’importe quel individu, fut-il l’ami du président de la République. En effet, selon les textes réglementaires de la fonction publique gabonaise, c’est à dire l’article 42 de sa sous-section réservée aux EPIC, il est clairement dit, qu’elles sont chargées de réaliser des opérations industrielles et commerciales de production, de transformation ou d’échange.
Autrement dit, ces établissements publics ont l’obligation de faire du profit, en créant de la richesse pour non seulement assurer leur fonctionnement, mais aussi pour ne plus dépendre de la subvention de l’Etat, et pour contribuer à l’économie nationale. La situation économique actuelle du Gabon, marquée par la baisse de ses recettes, ne peut plus permettre à l’Etat de continuer de subventionner ces entreprises.
Au risque d’être supprimées comme la CGC, le Comité de privatisation etc, ces EPIC doivent démontrer leurs capacités à s’autofinancer et à contribuer à l’économie nationale. Et c’est à ce niveau que l’on comprend l’importance d’avoir à leurs têtes, des personnes qualifiées et compétentes en matière de gestion des entreprises et des administrations. Ce qui n’est pas le cas actuellement, car les dirigeants actuels ont pour la plupart des profils alambiqués.
Des universitaires et non des professionnels
On constate pour le déplorer, que la majorité des personnes nommées à la tête des EPIC, ont des doctorats et des diplômes d’études approfondies en lettres modernes, en sciences sociales etc. Très peu sont diplômés en sciences de gestion avec une spécialité en gestion des entreprises, qui s’obtient après 5 à 8 années d’étude dans un établissement supérieur de gestion ou de commerce. On comprend alors les difficultés qu’éprouvent nos universitaires à gérer efficacement ces entreprises publiques et à produire des résultats. Ils ont été promus à des postes qui nécessitent de nos jours, un profil et une compétence avérée en matière de gestion des entreprises et des administrations.
Au regard de tous ce qui précède, nous pensons que la bonne gouvernance des établissements publics à caractère industriel et commercial du Gabon, tant recherchée par le gouvernement, doit passer désormais par un casting des personnes qui souhaitent être nommées à la tête de ces établissements. Un casting basé sur la présentation d’un projet de bonne gouvernance qui garantisse la croissance et la rentabilité de ces EPIC à court et moyen terme. Supprimer ces entreprises publiques au prétexte qu’elles ne sont pas rentables, n’est certainement pas la solution.
Joslin RENDERS BOUBATA (Gestionnaire des ressources humaines, spécialiste en audit et contrôle de gestion sociale).