Gabon/Assemblée nationale : Discours du président Faustin Boukoubi à l’occasion de la rentrée parlementaire
LIBREVILLE (Equateur) – L’ouverture de la première session ordinaire 2021 de l’Assemblée nationale, s’est déroulée ce lundi 1er mars à Libreville. A cette occasion, nous publions l’intégralité du discours du président de cette institution, Faustin Boukoubi.
Madame le Premier Ministre, Chef du Gouvernement,
Madame le Président du Sénat,
Madame le Président de la Cour Constitutionnelle,
Mesdames et Messieurs les Présidents des Institutions Constitutionnelles et hautes Autorités,
Excellence Monsieur le Doyen du Corps diplomatique,
Honorables Députés, chers collègues,
Excellences, Mesdames, Messieurs
Comme chaque année à pareille époque, nous nous acquittons d’un agréable devoir, celui de procéder à la rentrée de notre institution parlementaire.
La particularité de 2021, c’est que la session qui s’ouvre ce jour sera la dernière de quatre mois.
En effet, aux termes des dispositions du nouvel article 41 de la Constitution du 26 mars 1991, révisée en décembre dernier, le parlement se réunira désormais de plein droit au cours d’une session unique par an, débutant le premier jour ouvrable d’octobre et prenant fin, au plus tard, le dernier jour ouvrable de juin de l’année suivante.
Au cours de cette cérémonie solennelle que j’ai l’honneur et le privilège de présider une fois de plus, il m’est particulièrement agréable de remercier, au nom du Bureau de l’Assemblée Nationale et aux vôtres, l’ensemble des éminentes personnalités, qui par leur présence aujourd’hui, honorent de nouveau notre institution et manifestent ainsi la considération qu’ils portent à la Représentation Nationale.
Notre gratitude va en premier, à Madame le Premier Ministre, Chef du gouvernement.
En vous présentant nos vœux pour la continuité de votre mission, soyez assurée que l’Assemblée Nationale officiera toujours en parfaite collaboration avec le gouvernement et ce, dans le strict respect de nos prérogatives respectives.
A vous Madame le Président du SENAT, votre réélection ou plutôt votre plébiscite à la tête de la haute chambre de notre parlement, n’a surpris que ceux qui ne vous connaissent pas. Et je suis loin d’en faire partie.
En effet, c’est fort à propos que j’ai eu l’immense plaisir de louer vos mérites il y a de cela deux mois, en vous octroyant la plus haute distinction de l’Assemblée Nationale.
Sans que cet acte fût prémonitoire, il ne constituait pas moins un soutien tacite, à la fois républicain et fraternel.
Dans tous les cas, je vous félicite pour la confiance dont vous jouissez auprès de la hiérarchie de notre Parti commun et partant, de vos pairs, anciens et nouveaux Sénateurs.
En vous présentant nos vœux de réussite, pour cette nouvelle mission, je vous assure de notre franche collaboration, comme par le passé.
Par ailleurs, la nouvelle de la disparition d’une Sénatrice fraichement élue, qui n’a même pas eu l’opportunité de siéger au Sénat, nous attriste profondément, d’autant plus qu’il s’agissait d’une ancienne collègue à l’Assemblée Nationale durant la 12ème législature.
Compatriote affable, très sympathique et dépourvue de toute velléité de sectarisme, Philomène OGOULA, Philo pour les intimes, puisque c’est d’elle qu’il s’agit, était de surcroît très proche de ma famille.
En me tournant vers Madame le Président de la Cour Constitutionnelle, ce sentiment de profonde tristesse m’anime encore, au moment où cette haute juridiction vient de perdre son Doyen.
Tout en vous remerciant de votre présence constante à nos côtés, je ne saurais passer sous silence cette douloureuse perte incommensurable de notre Aîné à tous, le Docteur Hervé MOUTSINGA.
Encore mes sincères condoléances et bon courage, Madame le Président.
M’adressant aux Présidents des autres Institutions Constitutionnelles et Hautes autorités, votre participation régulière à nos travaux est la preuve suffisante d’une complémentarité d’actions de nos différentes institutions. Toute chose qui conforte leur solidité dans un contexte de démocratie agissante.
Quant à vous, Excellence Monsieur l’Ambassadeur de la République du Congo, Doyen du Corps Diplomatique accrédité dans notre pays, au-delà des convenances diplomatiques, votre présence remarquée à nos côtés traduit l’excellence de nos relations, qui en ce temps de la COVID-19, se sont révélées déterminantes, à l’épreuve des faits.
En effet, les aides multiformes des pays amis et organisations internationales, combinées au travail remarquable des autorités gabonaises, ont permis à notre pays de faire face à cette pandémie, en dépit d’une recrudescence observée ces derniers temps. Nous apprécions fortement cet élan d’amitié et de solidarité.
Par ailleurs, la réciprocité constituant un principe fondamental en diplomatie, tout en offrant leur hospitalité, voire des faveurs à des citoyens de pays amis, les Gabonais sont en droit d’en attendre, à défaut de reconnaissance, le respect de leur dignité et de surcroît, envers ceux qui incarnent l’autorité de l’Etat.
Excellences, Mesdames, Messieurs, dans son adresse à l’occasion des vœux à la nation, le Président de la République a axé son discours sur la jeunesse de notre cher Gabon. En effet, il a souligné que les jeunes ont payé un lourd tribut de la crise sanitaire due à la Covid-19. Car, ils ont vu leur scolarité perturbée et leur entrée sur le marché du travail être contrariée.
Aussi a-t-il insisté pour que 2021 soit l’année du rattrapage. Pour lui, il va falloir tout faire pour offrir aux jeunes de véritables perspectives d’avenir. En matière d’emploi notamment, la priorité absolue est de créer de nouveaux emplois, notamment pour cette catégorie d’âge sur le marché du travail.
Naturellement, l’Assemblée Nationale s’en réjouit et adhère totalement à cette heureuse perspective.
Madame le Premier Ministre, depuis que l’Assemblée Nationale vous a accordé sa confiance elle vous soutient pleinement et n’a de cesse de vous le réitérer à chaque occasion qui le requiert.
Pour paraphraser l’adage populaire, selon lequel « qui aime bien châtie bien », nous considérons que « qui soutient réellement, conseille opportunément », sans travestir la vérité.
De ce fait, il ne serait pas fallacieux de penser que votre gouvernement et vous-même, êtes attendus sur les résultats de votre stratégie de mise en œuvre du plan d’accélération de la transformation de notre pays, grâce notamment à la diversification de l’économie qui doit privilégier les secteurs à fortes potentialités.
En effet, à l’issue du dernier séminaire gouvernemental, organisé à la diligence du Président de la République, vous vous êtes engagée sur la mise en place de la stratégie de développement du Gabon pour la période 2021-2023 qui vise à accélérer la transition vers l’après pétrole, en stimulant les nouveaux moteurs de croissance et en repensant le modèle social du pays.
Eu égard aux instructions du chef de l’Etat, et compte tenu de vos propres engagements, le peuple gabonais, dont le Président de la République et la représentation nationale notamment, sommes l’émanation, vous exhorte à plus de résultats pour que les besoins immenses et légitimes de la population trouvent progressivement satisfaction.
Les Députés savent compter sur vous pour la réalisation de ce plan triennal, particulièrement en matière de routes, dont beaucoup sont dans un état catastrophique, de voiries, d’emplois, d’éducation, de santé, d’eau et d’électricité, j’en passe…
Distingués invités,
Honorables Députés, chers collègues,
L’Assemblée Nationale aborde cette nouvelle session dans les conditions particulières, notre pays à l’instar de toute la planète, vivant sous la menace désormais persistante d’un ennemi redoutable, la Covid.19.
C’est l’occasion, pour moi personnellement, de réaffirmer haut et fort, s’il en était encore besoin, à l’endroit de ceux qui en douteraient toujours ou qui prennent cela à la légère, que cette pandémie existe bel et bien dans notre pays. Je connais personnellement des compatriotes qui en ont souffert, d’autres qui en souffrent encore atrocement, et malheureusement, certains qui en sont morts !
Ne nous risquons pas à faire le Saint Thomas, en attendant de voir un proche nous quitter avant de prendre conscience de la gravité de la pandémie covid.19.
Pour sa part, l’Assemblée Nationale s’est félicitée de l’anticipation de la riposte orchestrée par le Chef de l’Etat, dès l’apparition du premier cas survenu dans notre pays.
Depuis lors, la Représentation Nationale prend en considération les déclarations du Gouvernement qui révèle que la situation sanitaire est grave, et approuve l’essentiel des mesures prises par l’exécutif afin de lui offrir toutes les chances d’éradiquer cette pandémie. Pour endiguer la propagation de cette nouvelle vague, très contagieuse, nous devrions agir à l’unisson, mieux encore, cultiver la cohésion et la solidarité nationales. A situation exceptionnelle, comportement exceptionnel ?
J’ai foi en une prise de conscience collective, susceptible d’engendrer une synergie citoyenne. J’ai foi en une confiance retrouvée, fusse – t – elle circonstancielle, entre dirigeants et dirigés, dans une dynamique de réalisme et de probité pour les uns, d’objectivité et de civisme pour les autres.
Oui, j’ai foi que, unis dans la Concorde et la Fraternité, le Gabon immortel, lègue de nos pionniers, gagnera la bataille contre la covid.19, mais aussi contre le chômage et la pauvreté, pour engranger la victoire de la prospérité.
Un nouvel espoir naît des préconisations affichées par l’Exécutif, de vacciner d’ici peu, un grand nombre de nos concitoyens qui le désireront.
Le coronavirus et beaucoup d’autres pathologies qui n’ont hélas pas disparu, bien qu’occultées par cette pandémie, tuent déjà énormément de gens ; faut-il encore en rajouter du fait des turpitudes des hommes ?
Malheureusement, les derniers événements survenus particulièrement à Libreville et Port-Gentil ont engendré, non seulement des blessés et la destruction de biens, mais aussi des pertes en vies humaines : deux morts ! Deux morts de trop !
Je profite de la présente occasion pour adresser aux familles si inutilement endeuillées, des jeunes Gildas ILOKO et Gency EMANE MVOMO, les condoléances de l’Assemblée Nationale.
Autant que faire se peut, veillons en tant que parents, à sensibiliser nos descendants afin qu’ils ne succombent pas aux tentations des messages susceptibles de leur faire prendre des risques.
A cet égard, le rôle initialement noble des réseaux dits sociaux est malencontreusement dévoyé et apparaît plus toxique que bénéfique à la société en général, à la jeunesse gabonaise en particulier. Les autorités compétentes devraient s’y pencher diligemment, avant qu’il ne soit trop tard.
Tout en regrettant fortement les décès de ces compatriotes, nous condamnons les manifestations de violences de toute sorte susceptibles de porter atteinte à l’intégrité et à la sécurité des personnes et des biens, de troubler l’ordre public et la paix sociale.
Cela étant clairement dit, nous ne jouerions pas pleinement notre rôle de représentants de la nation, si nous ne prêtions pas l’oreille à toutes les parties.
A cet égard, les cris de détresse qui nous parviennent révèlent que la situation économique et sociale est également précaire ! Ils ne peuvent laisser personne insensible, comme l’ont si bien relevé des Membres du Gouvernement dans leurs déclarations.
C’est peu de dire, que de nombreux compatriotes broient du noir depuis l’avènement de cette pandémie. Les activités commerciales, agricoles, cultuelles et culturelles sont fortement impactées par la Covid-19 et son corollaire.
Majoritairement, la population n’est pas systématiquement opposée aux mesures édictées par le Gouvernement. Elle appelle plutôt ce dernier à la prise en compte de ses souffrances induites par les effets pervers de ladite pandémie.
Il revient donc au Gouvernement de trouver un équilibre stratégique entre deux impératifs, à savoir :
– Préserver la nécessaire sécurité sanitaire de la population, à titre préventif et curatif, d’une part ;
– Atténuer les difficultés économiques et sociales, en ajustant opportunément les mesures et en améliorant l’accompagnement, d’autre part.
De la sorte, si le bénéfice engrangé par une mesure précise n’est pas supérieur aux inconvénients qu’elle engendre, ajuster aussitôt que possible ladite mesure pourrait éviter de préjudiciables frustrations et préserver la paix sociale.
A cet effet, les dernières décisions relatives à l’accroissement de l’offre de transport (l’augmentation du nombre de bus gratuits) et la prorogation des aides à certains petits opérateurs économiques vont dans le bon sens et méritent d’être encouragées.
Mais comme on le disait dans les temps immémoriaux, « plus on me donne, plus j’en réclame » !
Nous sommes en face de la problématique de protéger la population contre cette pandémie sans que le remède soit pire que le mal. Un dilemme que mon fils, médecin et Ministre, est mieux placé que moi pour comprendre et résoudre.
Un dilemme qui vient s’ajouter à d’autres pour lesquels la population attend impatiemment du Gouvernement des solutions efficaces. C’est le cas de la protection stratégique des éléphants, face à l’impérieuse nécessité de survie de la population humaine, dont l’alimentation et les sources déjà précaires de revenus sont compromises par ces pachydermes qui dévastent impunément leurs plantations. De solutions idoines s’imposent, car la protection de la faune ne peut durablement prospérer au détriment des vies humaines.
Bon courage, Madame le Premier Ministre.
M’adressant à vous, mes chers collègues Députés,
Je suis heureux de vous revoir après une intersession de deux mois, que vous avez su mettre à profit, en allant au contact de la population, chacun dans sa circonscription électorale d’attache.
Faut-il encore vous rappeler que l’intersession est pour nous Députés, l’occasion de renouer le contact avec nos bases électorales, en vue non seulement de leur dresser le bilan législatif de nos travaux, mais également de partager leurs préoccupations.
Par contre, au plan international, l’action diplomatique a été extrêmement limitée, du fait des contingentements inhérents à cette pandémie.
Seuls des échanges par visioconférences ont eu lieu, dans le cadre des institutions communautaires, en plus de nombreuses correspondances, avec les Parlements et les Exécutifs des pays amis.
Au cours de la présente session, notre rythme de travail sera ardu, en raison notamment des nombreuses modifications consécutives à la révision de notre loi fondamentale, qui conduiront à l’examen et l’adoption de plusieurs lois organiques et ordinaires.
En outre, dans le cadre de nos missions de contrôle et d’évaluation de l’action gouvernementale, nous allons nous efforcer d’appliquer la périodicité désormais mensuelle des questions orales au gouvernement, en plus de celles suscitées à tout moment par l’actualité, afin de mieux traduire les préoccupations légitimes de nos concitoyens.
Je sais toujours compter sur votre sens de responsabilité, votre loyauté aux institutions de la République, sur l’expression objective de vos opinions, sans renier vos sensibilités respectives, dans la rectitude qui nous caractérise et dans le respect des principes démocratiques.
L’Assemblée Nationale, doit constituer la vitrine de la société gabonaise : un modèle de courtoisie, de patriotisme, de démocratie participative, la tribune par excellence des débats républicains.
Honorables Collègues, je suis ravi à l’idée que chacun de nous ait pleinement conscience que le Député à l’Assemblée Nationale doit, en toute circonstance, faire preuve d’honorabilité, de dignité, d’exemplarité. La considération à notre égard en dépend.
Pour terminer, Distingués invités, Mesdames et Messieurs,
Persuadons tous nos concitoyens résidents ou en séjour, de respecter strictement les mesures barrières, en nous impliquant davantage dans la sensibilisation.
Nous comptons également sur la dextérité, la probité, la sagesse et le patriotisme de tous les concitoyens.
La perspective de la concrétisation du plan d’accélération de la transformation, ajoutée à nos efforts individuels et notre détermination à tous les niveaux, à éradiquer la propagation de cette maladie, nous donnent l’espoir de lendemains meilleurs, aussi bien aux plans économique, social que culturel.
C’est sur cette note d’espoir, tout en vous souhaitant bon courage, que je déclare ouverte la première session ordinaire de l’Assemblée Nationale de l’année 2021.
Merci à tous.