Gabon/Justice : Justin Ndoundangoye et Jean Aimé Nziengui pourraient être libérés

LIBREVILLE (Equateur) – L’affaire Justin Ndoundangoye et Jean Aimé Nziengui contre l’Agent Judiciaire de l’État et le Ministère Public, a été appelée à l’audience correctionnelle du Tribunal Spécialisé vendredi 26 novembre dernier. Tout au long du procès, l’accusation n’a produit aucune preuve, les infractions reprochées n’ont pas été constituées. Ce qui laisse supposer une éventuelle libération des mis en cause.

 

 

Selon un rapport exhaustif de l’ONG SOS Prisonnier Gabon, c’est à 12h31, que le procès de l’affaire Justin Ndoundangoye et Nziengui Jean Aimé contre l’Agent Judiciaire de l’État et le  Ministère Public, a débuté. Si les deux accusés sont présents aux côtés de leurs avocats, en revanche, le liquidateur de l’Octra, pièce maitresse de cette affaire, est absent.

 

 

Pour le procureur de la République, l’absence du liquidateur ne devrait pas empêcher le bon déroulement de l’audience, d’autant plus que ses déclarations sont contenues dans un procès-verbal. Une assertion qui n’est pas du goût des avocats de Justin Ndoundangoye et Jean Aimé Nziengui, qui estiment qu’au regard des accusations portées contre leurs clients, la présence du liquidateur s’impose, car il doit répondre à certaines questions.

 

 

« Nous avons des questions à poser au liquidateur pour la manifestation de la vérité », lancent les avocats à la présidente du Tribunal qui abonde dans le sens du procureur de la République. Une attitude qui laisse présager le sort réservé aux deux prévenus. L’audience se poursuit. L’examen de l’affaire au fond peut enfin commencer.

 

 

La parole est donnée à Jean Aimé Nziengui, ingénieur, consultant international en chemin de fer, enseignant à l’Université de Ponts et chaussées de France. Par ailleurs, gérant de la société Engerail, un cabinet d’études privé. Il est accusé d’avoir donné des pots-de-vin (rétro-commissions) au nom de sa société, à l’ancien ministre des Transports, Justin Ndoundangoye, après avoir obtenu un marché relatif au suivi du réseau ferroviaire à hauteur de 3 milliards 600 millions de FCFA. M. Nziengui explique, qu’il avait reçu un appel téléphonique du ministre des Transports pour prendre part à une réunion au Ministère le 23 janvier 2019. Le ministre de l’Économie de l’époque était également présent, affirme-t-il. Malheureusement, la réunion n’a plus eu lieu. C’est alors que le 29 janvier 2019, pendant qu’il était en voyage en France, sa société a signé un contrat de prestataire pour le suivi du réseau ferroviaire. Cette signature a eu lieu pendant qu’il était à l’étranger, par le gérant de la société, souligne-t-il.

 

 

C’est au tour de Justin Ndoundangoye de se soumettre à l’interrogatoire du Tribunal, qui veut savoir comment a-t-il connu la Société de Jean Aimé Nziengui. Ne voulant pas perdre du temps, Justin Ndoundangoye confie, que c’est au cours d’un Conseil interministériel,  qu’il a été instruit de trouver une entreprise capable de faire le suivi du réseau ferroviaire gabonais.  Et c’est dans ce contexte, que le Société de M. Nziengui a été retenue. Une réponse peu satisfaisante pour le Tribunal, qui interroge à nouveau M. Nziengui sur les 145 millions de FCFA, qu’il a remis à M. Ndoundangoye pour l’achat d’un terrain appartenant à l’Octra. En effet, d’après certains procès-verbaux, Jean Aimé Niengui a confié avoir remis ladite somme à l’ancien membre du gouvernement.

 

 

« Justin Ndoundangoye m’avait vendu un terrain à Avorbam à 100 millions, et quelque temps après, il m’avait appelé pour me dire, qu’il a besoin d’un prêt de 50 millions. Mais je n’avais pas 50 millions. Je lui ai remis 45 millions à la station, qui est en face de saint Georges. Justin m’avait montré un autre terrain à Owendo, qui était anciennement à l’Octra, et m’a assuré qu’il allait me rembourser mes 45 millions », a expliqué Jean Aimé. « Avez-vous signé un document qui prouve, que Justin Ndoundangoye allait vous rembourser ? », interroge le Tribunal qui visiblement, cherche à établir l’accusation de concussion, complicité de concussion et prise illégale d’intérêts. Des délits punis par les articles 48,127 et 130 du Code pénal gabonais.

 

 

A la question du Tribunal, M. Nziengui répond par un NON. Selon lui, le prêt a été fait sur la base de la confiance mutuelle et réciproque. Le Tribunal semble avoir trouvé la faille, pour faire condamner les deux prévenus. Et pour asséner un coup fatal à Justin et Jean Aimé, le Tribunal fait lecture de quelques procès-verbaux d’enquête préliminaire et du magistrat instructeur, dans lesquels Jean Aimé Nziengui aurait affirmé lors de la signature du contrat, « Justin m’avait dit, que je devais lui donner 150 millions de rétro-commissions; le versement de 3 milliards 600 millions devait se faire en 3 tranches et à chaque versement, je devais donner 50 millions à chaque versement ».

 

 

Surpris par ces allégations, Jean Aimé affirme devant tout le monde, qu’il ne reconnait pas avoir tenu de tels propos ni en enquête préliminaire ni devant le juge d’instruction. Laissant penser à un montage de toutes pièces visant à l’inculper. Interpellé à nouveau pour édifier l’assistance sur ce fameux prêt d’argent, l’ancien ministre d’Ali Bongo Ondimba reconnaît avoir reçu 50 millions le 15 mars 2019, 50 millions le 15 juin 2019 de la part de Jean Aimé Nziengui, mais pour l’achat d’un terrain à Avorbam (100 millions) et non pour une rétro-commissions.

 

 

« En ma qualité d’ancien ministre des Transports et responsable de l’ARTF (Autorité de Régulation des Transports Ferroviaires), j’avais reçu une promesse de vente d’un terrain de la liquidation d’Octra. J’ai donc proposé à Monsieur Nziengui ce terrain, qu’on allait substituer à la place du terrain d’Agondje. Nous sommes allés visiter ce terrain en présence d’un responsable de l’ARTF. Ce terrain avait été estimé à 200 millions », explique l’ancien parlementaire, qui brandit les preuves, notamment des documents du terrain que le liquidateur d’OCTRA lui a remis.

 

 

Des documents remis en cause pour la Tribunal pour défaut de signature du liquidateur de l’Octra, qui n’a pas daigné se présenter à l’audience. Malgré tout, poursuit Justin, « J’étais parti faire un retrait d’argent à BGFI du feu rouge de Batterie 4, mais là-bas, je vais apprendre que mon compte a été bloqué et que l’ordre est venu depuis le « haut. » J’avais trop de charge en tant qu’ancien ministre, j’ai donc appelé Monsieur Nziengui qui m’a prêté 45 millions le 11 novembre 2019 et une semaine après, j’ai été arrêté », a-t-il conclu.

 

 

Pour l’assistance, au regard des témoignages de Justin et Jean Aimé, et devant l’absence du liquidateur de l’Octra, il ne fait aucun doute, qu’ils sont innocents des accusations portées contre eux. Or, le Tribunal n’a pas dit son dernier mot. Et comme il fallait s’y attendre, le procès-verbal du Liquidateur fait surface. Dans ce document, ce dernier affirme qu’il n’a jamais fait une promesse de vente à Justin Ndoundangoye d’un terrain de la liquidation de l’Octra.

 

 

Cependant, comment savoir que ce fameux liquidateur dit la vérité dans la mesure où, il fuit l’interrogatoire des avocats des accusés ? Et pourquoi le Tribunal n’a pas exigé sa présence étant donné qu’il est la pomme de discorde dans cette affaire ? Sachant qu’un procès verbal peut être tripatouillé, la présence physique du liquidateur de l’Octra s’imposait, afin que l’on sache la vérité sur cette affaire de rétro-commission entre un ancien membre du gouvernement et un directeur d’entreprise.

 

 

Pour l’heure, les avocats de l’Etat gabonais ont demandé, que les prévenus soient condamnés. Ils ont exigé 1 milliards de FCFA aux deux prévenus, au titre de dommages-intérêts. Pour sa part, le procureur de la République, dans ses réquisitions, a demandé au Tribunal de « frapper fort » Justin Ndoundangoye et Jean Aimé Nziengui, et de ne point leur accorder de circonstance atténuante, même s’ils sont délinquants primaires. Il a demandé une peine maximale de 5 ans d’emprisonnement ferme et 10 millions de FCFA d’amendes.

 

 

Mais les avocats de Ndoundangoye et Nziengui, ont demandé au Tribunal de relaxer leurs clients, car tout au long du procès, l’accusation n’a produit aucune preuve, que les infractions reprochées ne sont pas constituées. L’affaire a été mise en délibéré au 10 décembre prochain.

 

 

 

Levi NGOMA

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